On se souvient des principales causes
qui ont conduit Ennahdha à réussir aux élections du 23 octobre 2011 et à
prendre le Pouvoir en associant deux partis laïques pour s’assurer une
couverture démocratique, surtout, aux yeux de l’opinion internationale. Chacun
sait que durant l’exercice de son pouvoir elle a tenté de remodeler notre
modèle de société. La graine a été semée et le Gouvernement Jomâa éprouve les
plus grandes difficultés à remettre le compteur à zéro.
Il est à craindre que les mêmes causes
vont produire les mêmes effets pour les prochaines élections si les partis
politiques qui sont contre le changement de notre modèle de société ainsi que
la société civile n’y prennent pas garde.
A mon humble avis, le sort des
prochaines élections demeure tributaire de l’action qui serait entreprise par
les forces politiques au cours du mois qui suit les inscriptions aux listes
électorales qui seront définitivement clôturées à l’expiration de ce mois
fatidique.
Tout se joue sur l’aptitude des forces
«laïques» toutes tendances confondues à puiser dans le réservoir des 60% environ
dégagés par les différents sondages d’opinion et qui n’ont pas encore fait leur
choix, soit en étant peu enclins à s’inscrire sur les listes électorales, soit
en penchant vers l’abstentionnisme.
Comme Ennahdha est un grand parti
structuré, organisé, et discipliné et ses objectifs sont clairs, il fera tout
pour renforcer son assise électorale auprès des indécis en invoquant pas mal
d’arguments, par exemple, le fait que sans lui la «charia» aurait été inscrite
expressément dans la Constitution, que la femme aurait été «complémentaire»
de l’homme, que la Constitution dans sa seconde mouture contraste avec la
première et que MBJ a qualifiée de «meilleure Constitution au monde». Elle dira
que sans sa participation au «dialogue national», elle serait encore au
Gouvernement et que le Gouvernement de «technocrates» qui lui a succédé n’a pas
pu faire économiquement mieux.
Toutes ces «concessions» ne justifient-elles pas une adhésion à ce parti!
Que feront les «laïques»? qu’ont-ils préparé? Rien ou presque.
Bien au contraire, ils se présentent encore une fois en rangs dispersés.
Premier échec, les élections parlementaires précèderont la présidentielle.
Ennahdha a voulu qu’il en soit ainsi et ce fut. Examinez les votes des
«laïques». C’est consternant.
Les amis d’hier qui ont tenu ensemble,
comme un seul bloc, le fameux meeting «d’Errahil», sont aujourd’hui dispersés
parce chacun veut un siège au Parlement ou la Présidence et pourquoi pas les
deux pour certains qui prennent les sondages pour de l’argent comptant !
Tous refusent de lire les seules tendances
exprimées par les sondages successifs. Leurs égos les poussent à croire en leur
chance sacrifiant le fond du problème qui est le maintien de notre modèle
de société.
Là réside le véritable enjeu de ces
élections car le modèle économique à adopter peut et doit recueillir
l’assentiment de toutes les forces politiques «laïques».
En effet, aucun parti politique ne peut
défendre une politique ultra libérale ou pire, une politique économique,
progressiste à l’extrême, qui bloque le développement économique du pays.
Soutenir le contraire, c’est faire preuve de démagogie électoraliste, ni plus,
ni moins ou de cécité politique.
Il y a véritablement péril en la demeure
face à ces tensions à l’intérieur des «laïques» et que ne justifie
aucunement l’intérêt supérieur du pays.
Peut-on espérer des regroupements de
dernière minute? Ne saurait-on pas enfin qu’il y un seul poste de Chef de
Gouvernement et un seul pour la Présidence et qu’en politique, c’est le
réalisme qui demeure la règle? Auront-t-ils le courage de préparer une
plateforme électorale commune et de la défendre chacun de son côté?
Ces prétendus leaders politiques
accepteraient-ils de céder leur place à l’un de leurs rivaux politiques pourvu
qu’il présente de larges chances d’emporter l’adhésion populaire et ce
une fois qu’un programme politique, social et économique commun aurait été
préalablement convenu entre eux en dehors de toute idéologie désuète? Le bon
sens et l’intérêt supérieur de ce pays le commandent.
Ce serait un miracle si M.M Hamdi, Hamma
Hammami, Néjib Echabbi, Mustapha Benjaafar, BéjiCaid Essebsi, notamment,
mesuraient les véritables enjeux et s’entendaient enfin pour se présenter en un
seul bloc !
En dehors de ce choix, le chemin est
semé d’embûches.
Par ailleurs, que les partisans d’Ennahdha
sachent que nous ne nourrissons aucune haine à leur égard et qu’il y a une
place pour eux dans la vie politique mais le modèle social importé qu’ils
désirent nous imposer, même à doses homéopathiques, nous effraie et nous
voulons nous en prémunir. Souhaitons pour eux que leur Congrès tranche enfin le
rôle de la religion dans la politique et la cohabitation politique sera alors
des plus sereine.
Nos politiques ont la lourde
responsabilité de choisir entre l’Union des forces progressistes et démocratiques
ou la désunion avec tous les risques qu’elle comporte. A eux de tirer les leçons
de notre histoire récente !
C’est l’espoir que je formule et je me
crois autoriser de rêver les yeux ouverts.
La situation regrettable que nous vivons ne nous empêche nullement
d’inciter nos enfants à s’inscrire et aller voter quelles que soient les
conditions de l’environnement électoral, bon ou mauvais.
Mokhtar El Khlifi
article publié dans Leaders.com.tn le 17/06/2014
article publié dans Leaders.com.tn le 17/06/2014