mercredi 25 février 2015

Quand notre pays se remettra-t-il au travail ?

24/02/2015
Nous venons d’apprendre qu’un accord entre le Gouvernement et l’UGTT a été signé le 23 février pour négocier les augmentations salariales,  dans le secteur public et relatives à l’année 2014, en dépit de la situation des finances publiques.  A quoi cela va aboutir ?
Malgré  cet accord, et aussi paradoxal que cela puisse paraître, le syndicat de l’enseignement secondaire maintient la pression et persiste à tenir en otage nos enfants, comme s’il ne croit pas à ce dialogue.
Il est notoire que les grèves,  avec arrêt du travail, se multiplient dans divers secteurs et que des syndicalistes croient bon, de nous rappeler, que la grève est un droit constitutionnel qui doit être amélioré. Entendez par là, que le préavis de grève devrait être éliminé, voire le recours aux réquisitions et aux lock-out!

Mais, qui a contesté le recours à la grève ? Personne. Tout au plus, certaines voix ont critiqué le nombre de jours de grève auxquels les syndicats recourent alors que quelques  heures auraient suffi pour tirer la sonnette d’alarme, si tel est le but.
D’autres ont, à juste titre, demandé que, dans la situation que traverse un pays exsangue, le travail ne doit pas être arrêté et qu’il suffit, comme les japonais et les coréens, de mettre un brassard au bras, pour obtenir le même effet, c’est-à-dire engager des discussions et parvenir à un accord.
Nous  nous  acheminons lentement et surement vers le triomphe de la loi du plus fort. Ce bras de fer nous reporte aux années anciennes où on concevait, à tort, que la force du travail ne peut être que l’ennemi du capital, public ou privé.
Certains se sont même enorgueillis d’avoir exercé la pression nécessaire pour que la « valeur travail » ne figure pas dans la constitution. Ils ont eu, malheureusement, gain de cause.
Comme on le constate,  certains  syndicalistes influents semblent abandonner les principes du militant feu F.Hached qui a travaillé, à un moment de notre histoire, en symbiose avec Bourguiba. Cette collaboration s’est poursuivie pour l’édification du nouvel Etat, mais aujourd’hui on y renonce.

Le syndicalisme tel que pratiqué aujourd’hui et basé uniquement sur les revendications matérielles  n’est pas celui de Hached. Nous nous devons de le dépasser avant qu’il ne soit trop tard.

Tous les experts, s’accordent à dire que le pays traverse une période difficile et que ni les finances de l’Etat ni celle des entreprises ne peuvent supporter des augmentations salariales mal étudiées.

Persister dans les arrêts de travail ne  fait qu’aggraver cette situation et bien évidemment ne concourt nullement à favoriser  l’investissement local et étranger seul garant de la création d’emplois.
C’est  bien connu de tous et c’est devenu une rengaine.
Est-ce que les syndicalistes pensent qu’ils sont dans leurs droits et que leur vis-à-vis peut les satisfaire, dans les conditions actuelles, mais s’y refusent? Est-ce la mentalité « après moi le déluge » ? Est-cela mentalité du « pourquoi pas moi » ?
Où bien, ce qui serait plus grave, est-ce que certains syndicalistes, particulièrement de gauche, ne croient pas dans l’équipe au Gouvernement et dans son aptitude à tirer le pays de l’impasse ce qui les pousserait à hâter sa chute pour caser leurs pions?
Ce qui nous autorise à le dire, c’est la contestation, sur les ondes, par certains syndicalistes, du modèle de développement annoncé par cette équipe et financé par des organismes étrangers (FMI, BIRD en particulier).
L’impression qui se dégage est que personne ne veut attendre que les choses s’éclaircissent. Personne, du moins actuellement, n’arrive pas à convaincre son vis-à-vis et qu’on est en présence d’un dialogue de sourds.
Certes, l’UGTT est une force de revendication qu’on ne peut ignorer et qu’il est vain de penser à encourager l’éclosion , non pas de « syndicats de maison », mais de forces ayant l’aptitude de lire  la situation réelle du pays sur le plan économique, social et politique et les multiples dangers extérieurs et internes qui nous guettent tous et sur lesquels on ferme les yeux.
La responsabilité de la bonne lecture des événements incombe à l’UGTT, elle-même, et nous avons bon espoir que le tir sera  bientôt rectifié.
Nous avons  tous mesuré l’effet du dialogue sur la réussite du processus démocratique de loin préférable à la confrontation et aux mouvements des foules.

Un véritable dialogue social doit voir le jour, le plus tôt possible, entre le Gouvernement, les organisations nationales, à savoir l’UTICA et l’UGTT, les partis politiques et la société civile. 

Que les experts des uns et des autres se mettent d’abord, enfin, sur la situation réelle du pays et ajustent leurs chiffres, une fois pour toutes. Ce n’est pas impossible.
Que les objectifs et les moyens du Gouvernement soient définis et exposés clairement. Qu’on y travaille tous de concert.

Que nos entreprises apprennent le langage de la vérité de leurs comptes et de l’obligation de ne plus frauder le fisc qui devra entamer sa réforme au plus vite, pour alléger la pression fiscale et introduire plus de justice.
Si tous les partenaires sont animés par la volonté de sauver la barque      «Tunisie », de produire plus et mieux et de répartir équitablement les fruits de la croissance, nous pourrions alors satisfaire les revendications légitimes des uns et des autres.
Sommes-nous réellement conscients que nous ne travaillons presque plus, ce qui ne nous empêche pas de réclamer, curieusement, des ajustements de nos salaires, au vu de la cherté de la vie ?

Sans ce dialogue franc et sincère, le cercle infernal des revendications va s’étendre nécessairement à d’autres corps de métiers indépendamment du niveau   que chaque corps occupe dans l’échelle des rémunérations.

Après la grève des ingénieurs, il aura celles des agents et des cadres de banque, des médecins généralistes, celle des juges et  celles des enseignants du supérieur qui occupent le haut du pavé sans parler des salaires, hors norme, des dirigeants des banques.
Oui, l’injustice  criante peut expliquer, dans une très large mesure, qu’un citoyen à bout, décide de suivre son syndicat pour bloquer, par ses grèves à répétition, l’activité économique. Mais lorsqu'il sentira qu’il y aura un capitaine à bord, soutenu par l’ensemble des organisations nationales, pour lui faire traverser le gué, il pourra accepter alors encore des sacrifices mais équitablement répartis.

Il ne tient qu’à nous tous de sauver ce petit pays plutôt que de tirer à hue et à dia.

Le citoyen a trop souffert et refuse que le marasme dans lequel il vit,  se prolonge encore. Il commence à avoir marre  de ce qui se passe dans  ce lambeau de terre car il ne perçoit pas encore une lueur d’espoir. Il demande aux politiques de s’organiser, de parler moins et d’agir plus vite et bien. Il demande à ses médias de se concentrer sur l’essentiel en œuvrant, certes, à informer librement,  mais aussi à stimuler les énergies. Il demande à ses institutions de se réformer et de fonctionner en toute transparence.
Quand notre pays se remettra-t-il enfin au travail qui ne manque pas ?
Au train où vont les choses nous risquons de perdre le capital confiance que nous accorde plus d’un pays prêts à soutenir nos efforts et il sera trop tard.


mardi 10 février 2015

Lettre ouverte à madame la ministre de la Culture

Article  publié dans Leaders.com le 09 Février 2015         

D’abord, on ne peut qu’être satisfait d’avoir un ministre ayant le profil de madame Lakhdar que plus d’un d’entre nous a eu le plaisir d’entendre sur  « Nessma », plus d’une fois, dans l’émission «MAGHRIBOUNA FEL TAHRIR WAL TANWIR ».

On ne peut que lui souhaiter plein succès dans sa délicate mission.

Madame la ministre sait que le terrorisme a de multiples fondements ; économiques, éducationnels et culturels, que sais-je encore et qui frappe même des personnes « instruites ».
 Laissons à l’armée et aux services de sécurité le soin de circonscrire, sur le terrain, l’action des terroristes et aux autres services de l’Etat de combler les lacunes au niveau de l’économique, du social et  de l’éducationnel.

Au niveau du culturel, je pense que le ministère de la culture a un rôle à jouer. 

Madame, j’ai pensé au lancement d’une chaîne de télévision culturelle qui pourrait recevoir le soutien matériel, outre celui de l’Etat tunisien, celui des pays concernés par le combat en profondeur du terrorisme devenu un phénomène mondial.(Mais, soyons clairs, je ne suis pas concerné par cette entreprise ).

J’ai pensé à l’Algérie, au Maroc, à notre pays bien évidemment,  à l’Egypte, à la Libye et  à certains pays du Nord de la Méditerranée ; la France, l’Espagne et l’Italie devenus conscients, aujourd’hui plus qu’hier, que le terrorisme peut aussi les frapper de plein fouet…

Si le soutien financier et technique ne pourrait pas constituer un véritable problème pourvu que la volonté politique existe, reste à définir le programme d’activité et la constitution de l’équipe chargée de diriger cette chaîne satellitaire dont la mission est autant nécessaire que délicate.

Mon idée est de faire de cette chaîne le porte-parole d’un islam modéré et ouvert sur le monde mais sans idée de prosélytisme religieux.

Cette chaîne est destinée à contrebalancer, en toute objectivité, et loin de toute démagogie, la propagande terroriste satellitaire qui frappe la jeunesse  musulmane  et qui ne trouve actuellement que quelques contradicteurs qu’il faudrait savoir dénicher dans les mosquées, sur les ondes ou dans quelques livres, ce qui est très peu.

Elle aurait pour but  aussi de faire revivre, le plus objectivement possible, la civilisation arabo islamique dans ses aspects les plus adaptés au xxi siècle et dont nos jeunes pourraient être fiers et s’en enorgueillir.

Le nœud du problème à résoudre est de pouvoir trier sur le volet l’équipe dirigeante et la définition de son programme d’actions.

Ce programme pourrait revêtir des analyses historiques, une lecture exacte de certains versets coraniques, sortis le plus souvent de leur contexte, des débats contradictoires avec d’éminents spécialistes du monde entier connus pour le sérieux de leurs parcours et particulièrement ceux dont le Maghreb regorge,  ainsi que des reportages sur notre histoire que plus d’un d’entre nous a perçue à travers des données travesties à dessein ou communiquées  vaguement par leurs aïeux.

C’est ce travail en profondeur et de longue haleine, à entreprendre après tout ce temps perdu, qui serait en mesure de défricher certains esprits et de limiter l’effet néfaste de la propagande wahabite qui fait des ravages dans le monde.

Puisse ma suggestion ne pas tomber, encore une fois, dans l’oreille d’un sourd.

Mokhtar el khlifi
08 /02/2015


vendredi 6 février 2015

Ennahdha, un pas de plus s’impose


Le rideau est tombé. Un nouveau Gouvernement vient de voir le jour ce jeudi 05 février 2015.La Tunisie a maintenant un Parlement et un Président de la République élus pour cinq ans ainsi qu' un Gouvernement d’Unité de partis. Sans doute,une bonne nouvelle pour le pays et pour l’étranger.
Chaque Ministre a été tenu de préparer un programme d’actions urgentes en cinq points, d’ici 10 jours. Secundo, et cela nous réconforte, il y aura enfin, un Plan de développement quinquennal, élaboré de concert avec les partis politiques, les organisations nationales et la société civile, de nature à préciser le cadre, les objectifs et les moyens de ce Gouvernement.
Suivons-le pas à pas, ne lui mettons pas les bâtons dans les roues en revenant aux sempiternelles manifestations avec des arrêts de la production et des services.
Cependant pour boucler la boucle, j’aurais souhaité qu'un Conseil économique et social,  new-look, soit ressuscité pour aider, par ses avis, et l’ARP et le Gouvernement dans leurs missions respectives. 
Souhaitons, tous, à ce Gouvernement plein succès.
On rappelera d’abord que ce Gouvernement vient d’obtenir un vote de confiance de l’ARP de 167 voix. Trente députés ont voté  contre et 8 se sont abstenus. Sur un total 217 députés, 12 se sont absentés. L’un des députés de Nidaa a voté contre et 4 se sont abstenus. Pour Ennahdha, 58 ont voté pour, 3 se sont abstenus et 8  figurent parmi les absents ( source Bawsla/marsad.tn).
Ma seconde remarque et la plus importante repose sur deux interventions remarquables, faites à l’ARP, par deux députés d’Ennahdha, celle de Monsieur Ahmed Mechergui et celle de Monsieur Abdellatif Mekki.
Monsieur Mechergui a commencé son intervention par un geste qui m’a ému personnellement en rappelant l’état de santé de Madame Maya Jeribi, l'énergique  secrétaire générale du Parti El Joumhouri. Cela n’a rien de politique me diriez-vous. Absolument pas, car, à mon sens, il aurait pu lui rendre simplement visite, mais il a tenu à exprimer publiquement sa sympathie à cette militante et,  à travers lui, celle des membres d’Ennahdha. C’est un geste nouveau de réconciliation des cœurs.
La seconde intervention est celle de Monsieur Mekki qui a demandé à l’assistance d’observer une minute de silence envers l’aviateur jordanien brûlé vif par Daech. C’est là un signe majeur de l’évolution d’Ennahdha à travers l’un de ses « faucons ».C’est réconfortant de condamner publiquement l’extrémisme de Daech qui existe tout prêt de nous en Libye prêt à semer la pagaille en Tunisie et dont "l’esprit", faut-il le souligner, existe à l’intérieur de nos frontières.(d’après le  MI)

Cela m’amène  à évoquer la volte-face de BCE et du parti qu’il a créé, récemment, de toutes pièces, pour contrebalancer le poids grandissant d’Ennahdha qui s’est employée, comme chacun le sait, à mettre la main sur les rouages de l’administration, à « réislamiser » le pays en introduisant la philosophie wahabite et celle des frères musulmans dans nos mosquées et dans des écoles coraniques qui ont poussé comme des champignons, sans occulter les encouragements tacites accordés aux extrémistes et le soutien direct à leur chef Abou yadh revenu victorieux à la mosquée El Fath, une fois l’ambassade US  investie.
J’ai personnellement cru que BCE, malgré son âge, était la seule planche de salut et c’est pourquoi plus d’un d’entre nous, sans adhérer à ce parti, lui ont fait confiance et ont voté pour son parti et pour lui.
En incluant Ennahdha dans le Gouvernement,même apparemment, à doses homéopathiques, dans sa seconde version, BCE, a-t-il, un seul instant, pensé qu’en revenant sur son engagement de ne s’associer qu’avec ceux qui partagent la défense de notre modèle de société, , il courait un risque certain de perdre une très grande partie de son électorat, composé surtout de femmes ?
A-t-il pris la peine d’en informer les adhérents  à Nidaa et à ses électeurs externes et de leur expliquer le pourquoi des choses ? Ils se sont sentis bernés.Certains députés de Nidaa  se sont abstenus ou ont voté contre. On les menace de sanctions au nom de la nécessité de respecter la discipline de parti ! Est-ce logique ?Est-ce acceptable?
En réponse à notre déception, on nous avance, l’argument selon lequel le peuple n’a pas accordé une majorité confortable à Nidaa ce qui voudrait dire que le peuple exige que le couple Nidaa-Ennahdha nous gouverne.
Je n’y crois pas car les chiffres montrent que Nidda pourrait gouverner avec une majorité,  quand bien même étriquée, et faire passer ses textes à l’ARP malgré une forte opposition.Respectons la  loi de la démocratie.
Dans son interview à un journal algérien, BCE affirme qu’il a été acculé à  faire ce choix par la faute de la gauche.
Je pense personnellement que l’entrevue de Paris, entre BCE et Ghannouchi, a scellé le destin de la Tunisie.
Les deux personnalités  sont   parvenues à s’entendre  sur la nécessité de recourir au dialogue et à la conjonction de leurs efforts pour sortir le pays de l’impasse.
Implicitement, ou par accord, des concessions devaient se faire de part et d’autre. Ce qui fut fait. La barre des 65 ans a été éliminée du projet de Constitution et le projet de loi sur l’exclusion a été abandonné.
Ennahdha, en la personne de son chef, n’a cessé de donner des signes de sa prédisposition à honorer son engagement moral. Abandon de la mouture du 1er juin de la Constitution, démission du Gouvernement Larayedh et nomination du Gouvernement de technocrates de Jomaa. Récemment, après les élections, on a assisté, par consensus, à la  répartition des responsabilités à la tête de l’ARP et à la rentrée d’Ennadha au Gouvernement.
C’est un gain politique majeur pour Ennahdha d’avoir un pied au Gouvernement pour savoir ce qui se passe en son sein et pour introduire, selon les mauvaises langues, au sein de Nidaa les germes de l’implosion pour s’accaparer  ensuite le Pouvoir, peut-être même, lors des municipales et en cas d’élections anticipées, dans un ou deux ans, ce qui n’est pas à exclure.
Je suis pour la réconciliation des tunisiens entre eux après avoir été séparés après la prise du Pouvoir par Ennahdha.
Cependant, pour que ce but soit atteint, je me tourne vers Ennahdha, pour lui dire, en toute naïveté peut-être, que les pas déjà faits et les appels du pieds que nous avons pu relever au sein de  l’ARP sont pour nous insuffisantes pour sceller cette réconciliation avec le peuple tunisien.
Oui, personnellement, je suis pour une entente avec Ennahdha, mais il faut des garanties.
Outre le comportement sur le terrain, il faut qu’Ennahdha tienne son Congrès pour modifier sa charte qui reconnaîtra le caractère civil de l’Etat, la séparation du religieux du politique et reniera  ses attaches aux frères musulmans et au wahabisme.
C’est à ce prix que la réconciliation nationale pourrait se faire, mais pas avant.
Ennahdha a évolué, mais il y a un pas de plus à faire pour que la sérénité se rétablisse !
Mokhtar el khlifi

06 /02/2015