24/02/2015
Nous venons d’apprendre qu’un accord entre le Gouvernement et l’UGTT a été
signé le 23 février pour négocier les augmentations salariales, dans le
secteur public et relatives à l’année 2014, en dépit de la situation des
finances publiques. A quoi cela va aboutir ?
Malgré cet accord, et aussi
paradoxal que cela puisse paraître, le syndicat de l’enseignement secondaire
maintient la pression et persiste à tenir en otage nos enfants, comme s’il ne
croit pas à ce dialogue.
Il est notoire que les grèves,
avec arrêt du travail, se multiplient dans divers secteurs et que des
syndicalistes croient bon, de nous rappeler, que la grève est un droit
constitutionnel qui doit être amélioré. Entendez par là, que le préavis de
grève devrait être éliminé, voire le recours aux réquisitions et aux lock-out!
Mais, qui a contesté le recours à la grève ? Personne. Tout au plus,
certaines voix ont critiqué le nombre de jours de grève auxquels les syndicats
recourent alors que quelques heures auraient suffi pour tirer la sonnette
d’alarme, si tel est le but.
D’autres ont, à juste titre, demandé que, dans la situation que traverse un
pays exsangue, le travail ne doit pas être arrêté et qu’il suffit, comme les
japonais et les coréens, de mettre un brassard au bras, pour obtenir le même
effet, c’est-à-dire engager des discussions et parvenir à un accord.
Nous nous acheminons lentement et surement vers le triomphe de
la loi du plus fort. Ce bras de fer nous reporte aux années anciennes où on
concevait, à tort, que la force du travail ne peut être que l’ennemi du
capital, public ou privé.
Certains se sont même enorgueillis
d’avoir exercé la pression nécessaire pour que la « valeur travail » ne figure
pas dans la constitution. Ils ont eu, malheureusement, gain de cause.
Comme on le constate,
certains syndicalistes influents semblent abandonner les principes du
militant feu F.Hached qui a travaillé, à un moment de notre histoire, en
symbiose avec Bourguiba. Cette collaboration s’est poursuivie pour
l’édification du nouvel Etat, mais aujourd’hui on y renonce.
Le syndicalisme tel que pratiqué aujourd’hui et basé uniquement sur les revendications matérielles n’est
pas celui de Hached. Nous nous devons de le dépasser avant qu’il ne soit trop
tard.
Tous les experts, s’accordent à dire que
le pays traverse une période difficile et que ni les finances de l’Etat ni
celle des entreprises ne peuvent supporter des augmentations salariales mal
étudiées.
Persister dans les arrêts de travail ne fait qu’aggraver cette situation et bien évidemment ne concourt nullement à favoriser l’investissement local et étranger seul garant de la création d’emplois.
C’est bien connu de tous et c’est devenu une rengaine.
Est-ce que les syndicalistes pensent qu’ils sont dans leurs droits et que
leur vis-à-vis peut les satisfaire, dans les conditions actuelles, mais s’y
refusent? Est-ce la mentalité « après moi le déluge » ? Est-cela mentalité du «
pourquoi pas moi » ?
Où bien, ce qui serait plus grave, est-ce que certains syndicalistes,
particulièrement de gauche, ne croient pas dans l’équipe au Gouvernement et
dans son aptitude à tirer le pays de l’impasse ce qui les pousserait à hâter sa
chute pour caser leurs pions?
Ce qui nous autorise à le dire, c’est la contestation, sur les ondes, par
certains syndicalistes, du modèle de développement annoncé par cette équipe et
financé par des organismes étrangers (FMI, BIRD en particulier).
L’impression qui se dégage est que personne ne veut attendre que les choses
s’éclaircissent. Personne, du moins actuellement, n’arrive pas à convaincre son
vis-à-vis et qu’on est en présence d’un dialogue de sourds.
Certes, l’UGTT est une force de
revendication qu’on ne peut ignorer et qu’il est vain de penser à encourager
l’éclosion , non pas de « syndicats de maison », mais de forces ayant
l’aptitude de lire la situation réelle du pays sur le plan économique,
social et politique et les multiples dangers extérieurs et internes qui nous
guettent tous et sur lesquels on ferme les yeux.
La responsabilité de la bonne lecture des événements incombe à l’UGTT, elle-même, et nous avons bon espoir que le tir sera bientôt rectifié.
Nous avons tous mesuré l’effet du dialogue sur la réussite du processus démocratique de loin préférable à la confrontation et aux mouvements des foules.
La responsabilité de la bonne lecture des événements incombe à l’UGTT, elle-même, et nous avons bon espoir que le tir sera bientôt rectifié.
Nous avons tous mesuré l’effet du dialogue sur la réussite du processus démocratique de loin préférable à la confrontation et aux mouvements des foules.
Un véritable dialogue social doit voir le jour, le plus tôt possible, entre le Gouvernement, les organisations nationales, à savoir l’UTICA et l’UGTT, les partis politiques et la société civile.
Que les experts des uns et des autres se
mettent d’abord, enfin, sur la situation réelle du pays et ajustent leurs
chiffres, une fois pour toutes. Ce n’est pas impossible.
Que les objectifs et les moyens du
Gouvernement soient définis et exposés clairement. Qu’on y travaille tous de
concert.
Que nos entreprises apprennent le
langage de la vérité de leurs comptes et de l’obligation de ne plus frauder le
fisc qui devra entamer sa réforme au plus vite, pour alléger la pression
fiscale et introduire plus de justice.
Si tous les partenaires sont animés par la volonté de sauver la barque «Tunisie », de produire plus et mieux et
de répartir équitablement les fruits de la croissance, nous pourrions alors
satisfaire les revendications légitimes des uns et des autres.
Sommes-nous réellement conscients que
nous ne travaillons presque plus, ce qui ne nous empêche pas de réclamer,
curieusement, des ajustements de nos salaires, au vu de la cherté de la vie ?
Sans ce dialogue franc et sincère, le
cercle infernal des revendications va s’étendre nécessairement à d’autres corps
de métiers indépendamment du niveau que chaque corps occupe dans
l’échelle des rémunérations.
Après la grève des ingénieurs, il aura celles des agents et des cadres de
banque, des médecins généralistes, celle des juges et celles des
enseignants du supérieur qui occupent le haut du pavé sans parler des salaires,
hors norme, des dirigeants des banques.
Oui, l’injustice criante peut
expliquer, dans une très large mesure, qu’un citoyen à bout, décide de suivre
son syndicat pour bloquer, par ses grèves à répétition, l’activité économique. Mais lorsqu'il sentira qu’il y aura un capitaine à bord, soutenu par l’ensemble des
organisations nationales, pour lui faire traverser le gué, il pourra accepter
alors encore des sacrifices mais équitablement répartis.
Il ne tient qu’à nous tous de sauver ce
petit pays plutôt que de tirer à hue et à dia.
Le citoyen a trop souffert et refuse que le marasme dans lequel il
vit, se prolonge encore. Il commence à avoir marre de ce qui se
passe dans ce lambeau de terre car il ne perçoit pas encore une lueur
d’espoir. Il demande aux politiques de s’organiser, de parler moins et d’agir
plus vite et bien. Il demande à ses médias de se concentrer sur l’essentiel en
œuvrant, certes, à informer librement, mais aussi à stimuler les
énergies. Il demande à ses institutions de se réformer et de fonctionner en
toute transparence.
Quand notre pays se remettra-t-il enfin au travail qui ne manque pas ?
Au train où vont les choses nous risquons de perdre le capital confiance
que nous accorde plus d’un pays prêts à soutenir nos efforts et il sera trop
tard.