dimanche 23 octobre 2016

Ce qu’on est en droit d’attendre du Chef du Gouvernement


Le  discours d’investiture du chef de Gouvernement, à l’ARP, a laissé bon nombre de citoyens sur leur faim. Ils se sont dit, qu’un package de mesures concrètes suivra. Mais l’attente a été longue alors que le rendez-vous de fin novembre des investisseurs arrive à grand pas. Gardons, cependant, bon espoir.
Peut-on oser dire ce que nous attendons ? Oui, cette « révolution » a diminué notre niveau de vie mais nous a gratifié de la liberté d’expression.
Il y a d’abord des préalables à satisfaire
1)  Ce n’est pas parce que le chef du Gouvernement s’est entouré, surtout de jeunes collaborateurs, bardés de titres, que la croissance économique repartira. Il ne faudrait pas faire l’erreur de mettre sur le bord de la route les gosses pointures de notre économie qui ont exercé surtout des fonctions ministérielles. On pourrait les inviter à faire partie du « Pool économique » à créer ou du « Conseil économique et social »  dont l’intérêt, tant pour l’ARP que pour le Gouvernement, est évident.
 A cet égard, pourquoi ne pas mettre à contribution, par exemple, monsieur Mohamed Ghannouchi pour ne citer que cette illustre personnalité qui  a pu assurer  à notre économie une croissance de 5%  en moyenne en dépit des dérives dont il n’assume pas, à mon humble avis, la responsabilité ? Il faudrait les pousser à mettre la main à la pâte, au moins pour nous aider à faire repartir la machine économique qui patine.
2)  Eviter, à tout prix, de lancer un mauvais signal aux investisseurs en se bornant à reproduire une loi des Finances préparée par le Gouvernement précèdent et qui n’a d’autres préoccupations que de trouver des ressources.
3)  L’Etat devrait se doter des moyens juridiques permettant de dépasser les contraintes administratives source de lenteurs et de débats interminables, quitte à ce que les contrôles a posteriori de l’ARP sanctionnent toute dérive. Cependant, cette délégation législative est à limiter dans le temps.
4)  Le Chef de Gouvernement n’a d’autres choix que d’agir, dans le cadre de ses larges attributions constitutionnelles, contre les individus qui dévergondent l’économie, en ayant le courage de se soustraire aux pressions  diverses qui pourraient s’exercer sur lui. C’est cette action courageuse que le peuple attend impatiemment. Le chef du Gouvernement devrait se placer au-dessus des partis en faisant peu de cas de son avenir politique. Il devra  apprendre à s’adresser directement et franchement au peuple en lui demandant son soutien, soutien qu’il lui accordera et qui légitimera son action.
5)  Engager, sans tarder, la réforme de la justice. Le Conseil supérieur de la justice, nouvellement élu, sera là pour épauler l’action du Ministre de la justice. Cette réforme pourrait se traduire, notamment, par l’informatisation et le renforcement des moyens humains. A cet égard, certains juges à la retraite, mus par un esprit nationaliste, pourraient faire bénéficier, bénévolement, la justice de leurs compétences, pendant une certaine période, pour traiter les dossiers en suspens. Une justice sereine, indépendante et rapide renforcera la crédibilité de l’Etat et sécurisera tout justiciable.

Quelques mesures attendues

a)  La loi de Finances pour 2017 devrait représenter la première année du plan de développement en cours d’élaboration. Elle se devrait de contribuer à rétablir la confiance des investisseurs  et du citoyen en général. Certes, il faudrait identifier des ressources. Mais, plutôt que de chercher à augmenter la pression fiscale il faudrait s’engager plutôt  sur la voie de sa compression. En effet, c’est sur l’entreprise que pèse la responsabilité de la création des emplois devant l’absence de moyens suffisants de l’Etat. Rappelons, que lorsque l’Etat a diminué, à un certain moment, les droits d’enregistrement, le citoyen a accouru aux guichets des Finances, pour enregistrer ses biens. Il faudrait gagner le pari  d’une diminution de l’impôt qui encouragerait le citoyen à s’acquitter de ses obligations fiscales. C’est  là aussi un signal positif adressé aux investisseurs, surtout étrangers.
b)  Veiller à ce que la fiscalité soit une obligation pour tous, soit juste sans être un frein à la croissance.
c)   Le déficit en ressources pourrait être comblé, par un élargissement des assiettes fiscales (limitation du régime forfaitaire… ) et la mise à contribution des professions qui ne paient pas actuellement suffisamment d’impôt. Il n’y a d’autres voies que le dialogue technique serré avec les professions qui ont chacune leurs spécificités.
d)  L’Etat devrait comprimer, cette année, ses dépenses, à l’exception des dépenses destinées à renforcer les équipements de sécurité. Une reconduction des enveloppes budgétaires antérieures et la généralisation de  la gestion informatique s’avèrent nécessaires.
e)  L’Etat devrait s’atteler à recouvrer, au plus vite, les créances qu’il détient sur les entreprises et les particuliers.
f)    L’excèdent constaté au niveau de la fonction publique devrait être redéployé, au plus vite, dans les administrations qui souffrent d’un manque, dans le renforcement des équipes de contrôle fiscal et dans le déblocage de certains investissements au niveau régional.
g)  Qu’attend l’Etat  pour céder  les biens confisqués sans pour autant les brader ? Un audit effectué par une équipe d’experts indépendants pourrait évaluer ces biens à leur juste valeur et l’Etat les vendrait, au moins à ce prix, sur appel d’offres transparents.
h)  Qu’attend l’Etat  pourrait-il céder, dans la transparence, certaines de ses participations dans les secteurs non stratégiques à définir rapidement.
i)   Le commerce parallèle accapare plus de 40% du PIB, fait qui ne peut plus durer. Qu’attend-t-on pour démanteler ces réseaux apparemment puissants à partir des résultats obtenus en aval (action dans la rue des salines, étalages de marchandises douteuses dans la rue,)? Certaines langues affirment que ces réseaux pourraient financer certains partis politiques et avoir des ramifications dans les structures de l’Etat. C’est la volonté politique du Chef de Gouvernement et le soutien de la société civile qui permettra de gagner la bataille. Que de nouvelles recettes budgétaires seraient attendues de cette action courageuse ! Certains disent qu’ils connaissent nommément ces barons de la contrebande et de la corruption. Un député  s’est dit prêt à livrer certains noms au chef du Gouvernement lors de la séance de son investiture. Alors ? Où le blocage réside-t-il ?
j)     Les dépenses de la caisse de compensation deviennent de plus en plus insoutenables. Il va falloir libérer certains prix. En ce qui concerne, le pain, l’huile, le sucre et certaines autres denrées alimentaires, il est possible de verser, à travers l’entreprise ou l’Etat, qui emploie les catégories à  faible revenus, mensuellement et régulièrement, une somme qui couvre leurs dépenses , à ce titre. Pour ceux qui sont sans emplois cet ajustement pourrait s’opérer au niveau des délégations au vu d’une liste ne prêtant à aucune confusion.
k)   L’augmentation des cotisations sociales, l’adjonction, au régime de répartition, d’une dose de capitalisation est nécessaire pour le rééquilibrage des caisses sociales. Le recouvrement des créances au titre des cotisations,  le relèvement de l’âge de la retraite  et le réexamen du mode de calcul des pensions nouvelles, urgent.
l)     La production de phosphates devra se maintenir et  s’accélérer étant entendu que le Gouvernement  devra honorer les engagements pris pour développer la région minière. Pour résoudre à terme le problème du transport coûteux du phosphate, pourquoi ne pas s’inspirer de l’expérience marocaine du transport par aspiration à  travers un tunnel ?
m) La transformation d’une partie plus importante de notre dette en investissements et l’étalement du reliquat pourraient être envisagées.
n)  Dresser un plan d’actions pour soutenir la campagne céréalière à engager suite aux pluies (augmentation des surfaces emblavées, alimentation en engrais, crédits agricoles).
o)  Venir en aide aux PME en difficultés qui emploient déjà un réservoir d’emplois qu’on risque de perdre.
p)  Désorganiser le trafic de devises en multipliant les contrôles et s’il le faut en autorisant l’ouverture de nouveaux bureaux de change dans les zones frontalières.
q)  Sur le plan extérieur nos exportations devront trouver de nouveaux débouchés avec un nécessaire accompagnement diplomatique et bancaire et la facilitation des moyens de transport maritimes et aériens pour atteindre notamment l’Afrique subsaharienne.
r)    Œuvrer pour rétablir plus rapidement la Paix en Libye, l’un de nos principaux partenaires.

En conclusion, ce train de mesures qui serait engagé, au plus vite, mettra le pays sur la voie de la reprise de la croissance.
C’est cette reprise de la croissance, tant attendue, qui diminuera les tensions sociales et poussera ce Gouvernement à aller plus loin dans le développement des infrastructures, les encouragements à la génération des richesses et leur redistribution équitable.
La stabilité politique et sociale et la  consolidation du processus démocratique sont à ce prix.
Nous n’attendons rien de ce Gouvernement que nous soutenons sinon qu’il administre la preuve qu’il est en mesure de mettre le pays sur la voie de la croissance.
Mokhtar el khlifi

23/10/2016

TV5-Exposition "L'Eveil d'une Nation"

mardi 18 octobre 2016

Le coup de semonce de l’UGTT se justifie-t-il ?

18/10/2016

Je dirai d’emblée oui. Cette organisation nationale a signé le fameux accord de Carthage précipitamment fait. Elle a reconnu expressément la situation  peu enviable que vit le pays  et notamment la situation de ses finances publiques. Elle a reconnu la nécessité des sacrifices à consentir par toutes les parties pourvu qu’ils soient équitablement répartis. Elle a manifesté sa disposition à poursuivre le dialogue et a saisi la main tendue du Gouvernement. Que veut-on de plus ?
Où se situe donc le problème ?
Je le situe, encore une fois, au niveau des « experts » des parties concernées. Chacune partie semble détenir la vérité alors que celle-ci pourrait être à mi-chemin.
Tout en excluant les éventuelles arrières pensées politiques, je pense qu’à partir de données communes et d’une même vision politique, il est possible de parvenir à un accord équitable.
A cet égard, il appartient à l’Administration, au sens large, ce qui inclut la BCT, de maîtriser ses données et de marquer sa disposition à les communiquer  d’autant qu’il y a une loi qui l’y oblige.
 Si elle en est matériellement incapable actuellement, il est temps qu’elle améliore ses procédures et recrute les profils idoines quitte à s’inspirer d’exemples étrangers. A l’heure du numérique, il n’est plus permis de ne pas dominer le problème des données.
 Le tableau de bord  nécessaire au décideur que le Gouvernement Jomaa en a parlé, semble ne pas  avoir été réalisé.
Aux organisations nationales de maîtriser également leurs données et de faire en sorte que  les informations soient fluides entre elles et l’Administration.
 Le temps du chacun pour soi est révolu surtout lorsque l’intérêt national est en jeu.
 A défaut de cette maîtrise des données, de cette fluidité et de cette transparence, l’orgueil personnel aidant, un problème technique national à résoudre, se transforme rapidement en suspicion et en querelles de personnes entre « experts » des différentes parties. Le pays doit pouvoir en faire l’économie au plus vite.
Nous venons d’apprendre que le Gouvernement s’apprête à créer un « pôle économique » composé d’experts. C’est là une excellente idée qui ne devrait pas cependant se substituer à la création du Conseil économique et social qui tarde à être réalisé.
 Mais son efficacité dépendra de sa composition.
 Il va falloir, je crois, ratisser large pour y inclure le plus grand nombre de ceux qui ont une compétence réelle avérée et même  de personnalités qui ne partagent pas les idées libérales de ce Gouvernement. Il faudrait aussi que ses travaux soient publiés.
Le coup de semonce de l’UGTT a le mérite de remettre les pendules à l’heure.
Imaginez un seul instant que cette organisation n’ait pas réagi fermement. La contrainte de temps aidant, le Gouvernement, disposant d’une majorité confortable à l’ARP, aurait pu faire passer le projet de loi de Finances concocté par ses services lequel aurait pu répondre à ses préoccupations immédiates et occulter les intérêts d’autres parties.
Sur le plan fiscal, ce qui m’inquiète surtout, c’est que le projet a pris le parti  d’obérer les charges de l’entreprise appelée pourtant à se substituer à un Etat défaillant dans la création des emplois tout en affectant également les revenus des classes moyennes moteur de la consommation.
Je ne suis pas fiscaliste, mais je dirai que si au lieu d’augmenter la pression fiscale le Gouvernement prenait le parti de la diminuer mais d’en élargir l’assiette et de mettre tous ses moyens pour réaliser un contrôle efficace et soutenu et qui tienne compte  des signes extérieurs de richesse, ce serait, de loin, beaucoup plus préférable. C’est là aussi un calcul à faire à partir des données en possession de l’Administration pour être sûr du volume des recettes fiscales.
Il demeure entendu que cet effort serait insuffisant si le commerce parallèle et la corruption ne seront pas combattus.
Mokhtar el khlifi


lundi 10 octobre 2016

Tunisie : Refaire l’union nationale

10/10/2016
Le Gouvernement de notre pays est dans une situation politique, financière,  économique et sociale très difficile.
Les engagements formels pris vis-à-vis des composantes de l’Union nationale scellée dans le fameux accord de Carthage et vis-à-vis des organismes internationaux  (FMI, BIRD) le lient au point de l’étrangler.
Une situation peu enviable pour un chef de Gouvernement sans grande expérience.
A ces engagements s’ajoute l’inexorable contrainte de temps. Une loi complémentaire des finances pour boucler le budget 2016,  la loi des finances pour 2017 à voter avant décembre 2016 et la rencontre avec les investisseurs étrangers de fin novembre. Un vrai casse-tête.
Si le Gouvernement précédent aurait été reconduit, mais cependant avec quelques modifications, nous aurions pu au moins gagner un peu plus de temps, mais l’initiative inattendue de BCE a tout chambardé sans que la nouvelle équipe ait montré  qu’elle dispose de solutions immédiates aux maux qui rongent nos finances et  qu’elle soit prête à donner un coup de pieds dans la fourmilière.
Comment sortir de cette impasse?
Je ne pense pas qu’on puisse convaincre le FMI de maintenir les salaires à un niveau aussi élevé et ne pas commencer à les comprimer.
La bonne orthodoxie financière et l’engagement pris s’y opposent. Cette compression des salaires est, d’ailleurs, l’un des bons signaux qu’attendent les investisseurs.
Il ne reste donc plus qu’à revoir l’accord de Carthage sur des bases précises en associant des composantes qu’on a laissé au bord de la route.
A cet égard, les « experts » aussi bien du Gouvernement, de la BCT, des organisations nationales, des partis politiques que de la société civile, pourquoi pas, devraient, autour d’une table, commencer par ajuster rapidement, leurs chiffres et donc avoir une idée très précise sur la situation réelle du pays.
Ils pourront alors proposer aux politiques les mesures à réaliser à court, moyen et long terme.
Le passé, particulièrement, de l’UGTT et de l’UTICA m’autorise à croire que face aux rapports que leur feront leurs «experts», elles prendront la bonne décision à savoir la voie des sacrifices librement consentis avant qu’on nous les impose de l’extérieur et à leurs conditions.
Sur le plan politique un retour  immédiat à la transparence et à la bonne gouvernance sera donc une nécessité.
En effet, on ne voit pas, actuellement, pourquoi le gouvernement ne s’engage pas d’une manière franche notamment sur la voie de réforme de la justice vers plus d’indépendance, de célérité et d’efficacité, de la  fiscalité et de la douane. Ce sont pourtant ces actions qui conforteront notre position vis à vis des bailleurs de fonds qui ne sont pas des âmes charitables, je vous prie de le croire.
C’est cet engagement sur la voie des réformes qui sera le véritable ciment d’une nouvelle union nationale plus large et plus homogène.

Sommes-nous enfin conscients que nous vivons le dernier quart d’heure?