Dans ce pauvre pays, c’est
la saison des pavés dans la mare. Le premier dont les conséquences ne sont pas
prêtes d’être éteintes a émané du
respectable Cheikh Rached Ghannouchi, qui sans crier gare et au mépris des
dispositions constitutionnelles, a intimé l’ordre au jeune et dynamique chef de
Gouvernement Yousef Chahed de ne pas se présenter aux élections présidentielles
de 2019 et de le déclarer publiquement s’il entend rester à ce poste pour expédier les affaires
courantes. J’avais, peut-être à tort, pensé qu’il ne pouvait faire pareille
déclaration qu’après discussion avec le Président de la République, BCE .Mais,
au vu des flèches qu’il vient de décocher à Si Rached ce 13 août (caractère
prématuré de penser en 2017 à des élections qui pourraient se tenir en 2019, contestation
de ses interventions en matière de politique étrangère, la constitution
boiteuse de juin, l’alignement sur l’ami turc…) Je pense que le courant ne passe plus très bien entre
les deux vieux et c’est tant mieux.
C’est ce nouvel
environnement qui aurait poussé BCE, à jeter à son tour son pavé dans la mare,
en donnant le signal de l’ouverture de la boîte de Pandore de l’égalité de
l’héritage et de l’abrogation de la fameuse
circulaire de 1973 cédant ainsi et enfin aux pressions des femmes
démocrates. C’est BCE qui a aussi,
je crois, lever les réserves aux conventions internationales.
Par cette proposition
voudrait-il récupérer une partie de l’électorat, surtout féminin, qui lui a
échappé après son rapprochement avec Ennahdha et devant le refus du Front
populaire ?
A cet effet, il a cru bon de
désigner une commission dont la composition est, à mon avis, loin d’être
neutre. Elle a été proposée, je pense, par les femmes démocrates. Je n’ai pas
vu l’ombre d’un de nos cheikhs modérés comme s’il y en avait pas. Je n’ai pas
vu Si Youssef Essedik. Je n’ai pas vu madame Lakhdhar et j’en passe. Quant au
Mufti , je lui pardonne sa précipitation.
Affirmer que discuter de ces
problèmes ne relève pas de la religion, c’est ma foi, aller un peu trop vite en
besogne. Pourtant il y a des versets clairs dans notre Livre sacré. Certes, le
droit objectif n’applique pas strictement ce que dispose le Coran puisque ont
été exclues de l’héritage certaines personnes mais, Je suis pour une lecture et
une adaptation du texte coranique aux réalités du siècle où nous vivons mais
pas par l’exécutif et sous la pression de certains lobbies. Faisons comme a
fait Bourguiba en 1956.Il bien consulté nos Oulémas et des plus compétents. Ils
ont entériné la répudiation et j’en suis convaincu mais se sont opposés à
l’égalité de l’héritage. Demandons à Si Ahmed Mestiri, que DIEU le préserve,
pourquoi. Il est le seul qui maitrise la question.
Si la loi relative à la
défense de la femme et de l’enfant contre les violences est une urgence
nationale et qui a été, d’ailleurs, longuement débattue, il n’en est pas de
même de la loi sur l’héritage et l’abrogation de la circulaire de 1973 qui
peuvent attendre encore, non les calendes grecques, mais au cours de la
prochaine présidentielle, le temps que
l’économie reprenne son souffle et que le terrorisme et la corruption soient
maitrisés.
Déjà les longues discussions sur l’identité
nous ont fait perdre un temps fou et ont contribué à diviser le pays et voilà
qu’à la veille d’élections municipales
l’exécutif pose des problèmes qui divisent le pays.
Il y a des concitoyens qui
sont prompt à s’aligner sur les valeurs dites universelles comme si nous
musulmans, il est vrai faibles actuellement, parce que en état de décadence
économique, n’aviez-nous pas nos propres valeurs qui peuvent ne pas coïncider
avec celles de l’occident qui cherche à nous les imposer allant jusqu’à conditionner ses prêts.
Au rythme où vont les choses, il n’est pas
étonnant que cet occident derrière lequel on court et qui en fait nous rejette,
surtout après nos exploits obscurantistes, nous demandera de réviser notre
Coran, d’en supprimer certains passages ou de le retirer de la circulation.
Certes, je ne suis pas pour
une application stricte des textes coraniques qui parfois sont devenus désuets
par la force du temps telles que la référence à l’esclavage, mais « Lisons »
alors, une fois pour toutes, notre Coran, comme nous y invite Si Youssef
Essedik.
Lisons-le ensemble,
c'est-à-dire, tous les courants de pensée confondus avec la nécessité de la
présence de nos oulémas, de philosophes, d’anthropologues, d’historiens, de
linguistes, de grammairiens, de scientifiques … et que cette commission se
prononce sur ce nous divise, éloigne nos
enfants de notre religion, attire la haine de l’autre envers l’Islam et proposons
des règles à suivre ou à ne pas transgresser pour être en cohérence avec les principaux
fondements du Livre sacré.
Boire ou non l’alcool, faire
ou non Ramadhan même dans des conditions
draconiennes comme cette année, faire le pèlerinage, consentir le mariage avec le non musulman, les règles à
suivre en matière d’héritage et j’en passe.
Les jeunes et les moins
jeunes se cherchent et veulent avoir une feuille de route claire. Certains
versent dans le christianisme. Allez visiter les églises. Certains ont opté
pour le libertinage et le dévergondage.
Ils s’éloignent de la vie publique comme le prouve leur absence du registre
électoral. C’est leur droit Constitution à l’appui, me diriez-vous, mais en
tant autorité politique vous avez la lourde responsabilité de veiller à ce que
ce peuple constitué de musulmans essentiellement le reste et que la situation
n’empire pas. Le vent de la liberté souffle un peu trop fort et risque de tout
emporter. Les paravents sont nécessaires et ce n’est pas certainement la
commission de BCE qui pourra faire ce travail avec tous les égards qu’on pourrait
porter à ses membres.
Je voudrais revenir sur
l’égalité de l’héritage. La justice de Dieu a été amplement évoquée.
J’avertis la commission que
nul n’a le droit de disposer des biens d’une personne. C’est celui qui est
propriétaire de ces biens qui a le droit de son vivant, d’en disposer.
Si la loi devrait être amendée, elle devra
respecter le principe sacro-saint du droit de la propriété en stipulant que le propriétaire des biens pourra les répartir, entre ses
enfants et pour qui bon lui semble, dans les proportions qu’il jugera
nécessaires. Il pourra, en son âme et conscience, privilégier sa femme, sa
fille ou son fils ou les mettre tous sur un même d’égalité, ce sera son plein
droit. Il n’a de compte à rendre qu’à DIEU. En
agissant ainsi le parent sait ce qu’il fait. Par exemple, si son fils a
réussi dans la vie sociale et que sa sœur non, pourquoi voulez-vous que le fils
accroisse injustement ses richesses au détriment de sa sœur ( qui est
au-dessous du SMIG puisqu’on lui sert 400
dinars en dépit de ses diplômes) ? Si la fille s’est comportée tendrement
à son égard alors que le fils ne l’a pas fait, pourquoi voulez-vous que la loi
lui impose l’égalité entre la fille et le garçon ? Vous parlez de justice,
c’est ça la justice. Et l’inverse est vrai !
Que la commission ne se mêle
pas de ce qui ne la regarde pas.
A bon entendeur salut.
15/08/2017
Mokhtar el khlifi